L'Esclavage

Publié le par Franck

L'esclavage est la condition sociale des esclaves, des travailleurs non libres et généralement non rémunérés qui sont juridiquement la propriété d'une autre personne et donc négociables (achat, vente, location, ...), au même titre qu'un objet ou un animal domestique. Au sens large, l'esclavage est le système socio-économique reposant sur le maintien et l'exploitation de personnes dans cette condition.

Défini comme un « outil animé » par Aristote (Éthique à Nicomaque, VI, chap. VIII-XIII), l’esclave se distingue du serf, du captif ou du forçat, conditions voisines dans l'exploitation, et de la bête de somme, par un statut juridique propre, déterminé par les règles (coutumes, lois, ...) en vigueur dans le pays et l’époque considérés. Ces règles fixent notamment les conditions par lesquelles on devient esclave ou on cesse de l'être, quelles limitations s'imposent au maître, quelles marge de liberté et protection légale l'esclave conserve, quelle humanité (quelle âme, sur le plan religieux) on lui reconnait, etc. L'affranchissement d'un esclave (par son maître ou par l'autorité du prince) fait de lui un affranchi avec un statut proche de celui d'un individu ordinaire.

Les traites négrières sont les plus emblématiques des pratiques esclavagistes, de par leur durée (plusieurs siècles), leur ampleur (plusieurs dizaines de millions d'esclaves), et leur impact historique (notamment aux États-Unis et sur l'Afrique).

Ponctuellement condamné depuis l'antiquité (moralement et parfois juridiquement), et plus récemment par les droits de l'homme, l'abolition de l'esclavage a pris long temps. L'esclavage est aujourd'hui officiellement banni (via par exemple le Pacte international relatif aux droits civils et politiques). Néanmoins, outre le fait qu'il ne suffit pas d'interdire une pratique pour la voir totalement disparaitre, il peut encore exister localement des tolérances des pouvoirs publics.

 

Étymologies  

Le terme moderne « esclavage » vient du latin médiéval sclavus déformation du mot latin slavus (le slave) . Le mot « esclave » serait apparu au Haut Moyen Âge à Venise , où la plupart des esclaves étaient des Slaves des Balkans, « une région qui s'appelait autrefois « Esclavonie », puis Slavonie, et qui est récemment devenue indépendante, sous le nom de « Croatie » ». La même racine se retrouve dans le mot arabe saqaliba, ce qui n'a rien d'étonnant puisque les Turcs se procuraient leur futurs janissaires en achetant ou capturant des enfants chrétiens dans la même région.

Rome pratiquant l'esclavage, comme tous les peuples antiques, le latin disposait évidemment d'un terme pour désigner l'esclave : servus, qui a conduit aux termes « servile » et « servilité », relatifs à l'esclave et à sa condition. Ce mot a aussi donné naissance aux termes « serf » du Moyen Âge et aux modernes « service », « serviteur », voire « ciao », etc.

Définition française [

Selon l'Académie française, l'esclave est une « personne qui n'est pas de condition libre, qui appartient à un maître exerçant sur elle un pouvoir absolu. » . L'esclavage est donc avant tout la condition d'esclave, et la réduction d'un homme à l'état d'esclave.

L'esclave peut dépendre de toute autorité : personne, groupe, organisation ou encore État. L'Académie française ajoute à cela, par extension, toute « institution sociale fondée sur l'existence d'une classe d'esclaves »  

Par analogie, l'esclavage est donc l’« état, [la] condition de ceux qui sont soumis à une tyrannie, à une autorité arbitraire ; asservissement, servitude. »  .

La définition n'exclut donc pas formellement la notion de servitude volontaire.

Autres sens :

  • Au sens figuré, l'esclavage est l'état d'une « personne qui, par intérêt ou par goût, se met dans la dépendance d'une autre et suit aveuglément ses volontés. » 
  • Par extension, « se dit d'une personne qui se tient dans un état d'assujettissement, de dépendance, qui subit l'empire d'une chose. »  
  • Au figuré, « se dit de tout ce qui tient dans un état d'assujettissement, de dépendance. L'esclavage du tabac. L'esclavage de la mode. L'esclavage des passions. Par métonymie, activité imposant une sujétion. Ce travail est lucratif, mais c'est un véritable esclavage. »

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Coupe d'un navire négrier tel que figurant dans la bande dessinée les Passagers du vent.

Les sources de l'esclavage  

Une condition héréditaire  

La transmission héréditaire du statut d'esclave est historiquement récurrente. Les modalités et le degré de formalisation des règles de transmission sont cependant variables. Durant la période romaine classique, ce statut s'hérite par la mère, sans qu'aucune attention ne soit portée à la condition du père . On nomme verna un esclave de naissance. Aux États-Unis, si la législation est mouvante dans le temps et, surtout, différenciée selon les États, la transmission de la condition d'esclave par la mère est très largement dominante. Les premiers textes en attestant sont le statut du Maryland de 1664 et le code virginien de 1705 . La loi a parfois répondu aux rares cas d'union entre femmes libres et esclaves en imposant aux enfants de servir le maître de leur père, à vie ou pour une durée déterminée .

À compter d'Omar, dans la seconde moitié du VIIe siècle, la législation islamique prend le contre-pied de ce mode de transmission, en posant que l'enfant d'une esclave est libre si le propriétaire est le père de l'enfant. La « mère d'enfant » – le titre est officiel – est libérée à la mort de son maître. La législation islamique se situe sur ce point dans la continuité des législations mésopotamiennes qui nous sont parvenues : un père libre et veuf qui épouse une esclave peut même faire de l'enfant qui naîtrait de cette union son héritier s'il l'a expressément adopté. La descendance d'une mère libre et d'un esclave est automatiquement libre .

La décision judiciaire [

Le code d'Hammourabi mentionne pour la Mésopotamie des sanctions juridiques conduisant à l'esclavage comme, par exemple, la répudiation de ses parents par un enfant adopté. Sous la République romaine, certaines infractions entraînent la déchéance des droits civiques (capitis deminutio maxima) : les déserteurs et les citoyens qui se sont dérobés au cens peuvent ainsi être vendus comme esclave par un magistrat, en dehors de Rome toutefois. Sous l'Empire, la condamnation aux mines (ad metalla) est l'une des peines les plus redoutées. Aux États-Unis, les Noirs libres peuvent être condamnés à l'esclavage pour un ensemble d'infractions juridiques assez larges : l'accueil d'un esclave fugitif, le fait de rester sur le territoire de certains États, telle la Virginie, un an après son émancipation.

Les abandons d'enfants  

L'esclavage touche historiquement les populations les plus fragiles et en premier lieu les enfants. Le sort de l'enfant abandonné le conduisait ainsi souvent à l'esclavage en Mésopotamie et plus tard en Grèce et à Rome. Dans ces deux dernières civilisations antiques, le droit d'exposition autorise l'abandon d'un enfant, le plus souvent devant un bâtiment public, un temple par exemple. L'enfant recueilli est soumis à l'arbitraire de son « bienfaiteur » et échappe rarement à l'esclavage.

Quand il n'est pas abandonné, l'enfant peut aussi être vendu. Des contrats de vente d'enfants , datant de la troisième dynastie d'Ur, indiquent que la pratique semble être répandue au sein des civilisations mésopotaniennes .

La servitude pour dettes  
Article détaillé : Servitude pour dettes.

La servitude pour dette résulte d'une procédure, parfois encadrée juridiquement, qui consistait à s'acquitter d'une créance par l'abandon de la propriété de soi à son créancier. Fréquente parmi les paysans pauvres athéniens, au point d'être interdite par Solon au VIe siècle av. J.-C., elle constitue l'une des formes d'esclavage persistante dans la période contemporaine.

Guerre et razzias 

Il est fréquent au cours de l'Histoire que la réduction en esclavage soit le sort réservé aux prisonniers de guerre. Cette dernière est ainsi souvent un facteur de recrudescence de la pratique esclavagiste. En attestent l'afflux d'esclaves à Rome à la suite de ses différentes campagnes militaires victorieuses (guerres puniques, guerre des Cimbres, guerre des Gaules) ou le maintien de l'esclavage dans la péninsule ibérique à la suite des luttes que se livrent arabes et chrétiens du VIIIe siècle au XVe siècle. Dans la période contemporaine, le conflit du Darfour est un exemple des liens que peuvent entretenir esclavage et conflits guerriers.

Les razzias, pratiquées par les pirates ou au nom d'une entité politique, sont un autre moyen d'approvisionnement en marchandise humaine. Dans l'Antiquité romaine, la piraterie méditerranéenne alimente un commerce florissant qui possède ses intermédiaires spécialisés et ses places de commerce comme l'île de Délos. La piraterie des barbaresques en Méditerranée restera pour sa part active jusqu'au XIXe siècle.

Lors des différentes traites qu'a connu l'histoire de l'humanité, la capture des esclaves est fréquemment assurée par des groupes n'utilisant pas eux-mêmes les esclaves ou seulement en proportion limitée. Si les lançados portugais, actifs sur le sol africain, ont approvisionné les navires négriers, leur participation à l'alimentation du commerce triangulaire fut par exemple minoritaire. La grande majorité de l'approvisionnement des places de commerce était le fait d'États côtiers, de chefs locaux ou de marchands eux-mêmes africains, dont l'activité s'est progressivement centrée sur le trafic d'esclaves. De la même manière, durant l'Antiquité grecque, les marchands d'esclaves achetaient les captifs à des intermédiaires, souvent non grecs, dont les modalités d'approvisionnement nous restent largement inconnues. La capture des esclaves était donc dans une large mesure « externalisée » par les sociétés en mesure d'établir un système durable d'échange marchand d'humains avec les sociétés qui les fournissaient en main d'œuvre servile.

 

Le commerce 
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Le marché aux esclaves
Gustave Clarence Rodolphe Boulanger v.1882
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Manière dont les prisonniers chrétiens sont vendus comme esclaves au marché d'Alger. Gravure hollandaise de 1684.

Les réseaux commerciaux ont évolué en fonction de la demande en esclaves qui s'est longtemps confondue avec les grands centres économiques et politiques. Dans l'Antiquité, les réseaux commerciaux sont tournés vers la Grèce, Carthage puis l'Empire romain. Si un trafic est attestée dès la période archaïque, c'est l'augmentation de la demande au VIe siècle av. J.-C. qui entraîne semble-t-il le développement d'un circuit commercial de grande ampleur.

Des marchés, alimentés par des trafiquants spécialisés, fournissaient une main-d'œuvre barbare directement dans les places grecques (Corinthe, Chypre, Délos, Athènes...). À Rome, un marché se tenait au cœur de la ville, sur le Forum, près du temple de Castor.

Au cours du Moyen Âge, la traite s'oriente vers l'Afrique du Nord, la Mésopotamie et l'Europe méditerranéenne (Italie, Catalogne, Crète, Chypre, Majorque...). Les principales routes commerciales trouvent leurs sources en Afrique subsaharienne et les régions européennes non christianisées (traite des slaves païens et chrétiens depuis les Balkans, traite des blancs capturés au cours de la conquête ottomane...).

Après l'exploration des côtes africaines au XVe siècle, le Portugal initie une traite tournée vers les îles atlantiques et la péninsule ibérique. À l'époque moderne, ce commerce européen des esclaves évolue vers une forme transatlantique connue sous le nom de commerce triangulaire qui perdure du XVIe au XIXe siècle. Les estimations du nombre de déportés varient, selon les auteurs, de 11 millions (pour Olivier Pétré-Grenouilleau) à 50 millions (pour Victor Bissengué).

Le commerce arabe des esclaves est resté actif de l'Antiquité à l'époque moderne, ses zones d'approvisionnement traditionnelles sont l'Afrique noire (traite subsaharienne), les régions de la mer Noire ou la côte orientale de l'Afrique (Zanzibar). Les ramifications de ce trafic semblent rayonner, bien que sans doute dans des proportions réduites, jusqu'en Extrême-Orient : on retrouve ainsi au XIIIe siècle des traces d'esclaves noirs sur la route de la soie. Pour ce qui est de la traite organisée par des Africains eux-mêmes, dite « traite intra-africaine », les traces écrites quasi-inexistantes jusqu'au XIXe siècle rendent difficile une évaluation quantitative crédible. Cependant la traite arabe ne se limite pas à la traite des Noirs puisque durant le Régence d'Alger (époque précédant la conquête de l'Algérie par la France), les prisonniers chrétiens sont vendus comme esclaves au marché d'Alger.

Les formes actuelles de l'esclavage répondent aux mêmes caractéristiques, notamment les réseaux de proxénétisme, tournés vers les lieux de consommation.

Fonctions 

Les fonctions de l'esclavage ont fortement varié selon les sociétés et les périodes historiques. En premier lieu, on opère traditionnellement une distinction sur la base de l'importance tenue par les esclaves dans l'économie générale des rapports de production et des relations symboliques. On désigne ainsi une société dont les esclaves occupent une fonction indispensable à son fonctionnement global sous les termes de « société esclavagiste » (slave society), pour la distinguer des « sociétés à esclaves » (society with slave) qui emploient des esclaves sans en faire un maillon indispensable de leur système économique et social. L'historiographie considère généralement les sociétés antiques grecques et romaines, le système économique et social des Antilles, du Brésil et des Antilles durant la période coloniale (du XVIIe siècle au XIXe siècle) et du Sud des États-Unis avant la guerre de Sécession comme des exemples de sociétés esclavagistes. À l'inverse, le Moyen Âge occidental ou le monde arabe, qui connaissent l'esclavage, sont considérées comme des sociétés à esclave et non comme des sociétés esclavagistes.

Les esclaves ont rempli au cours de l'histoire une large palette de métiers et de fonctions sociales. Dans les sociétés antiques, les esclaves sont ainsi présents dans l'ensemble des secteurs de l'économie, sans qu'aucun métier ne leur soit réservé en propre. Ils peuvent exercer le métier de pédagogue ou de médecin, sont très présents dans les secteurs qui nécessitent la manipulation de l'argent, la banque en particulier , mais aussi dans l'artisanat (ateliers de céramique). Le cas fait cependant figure d'exception : il est fréquent au cours de l'histoire que des esclaves aient été exclus de certaines professions, et confinés dans les travaux considérés comme les plus dégradants.

On peut distinguer, au cours de l'Histoire, un certain nombre d'usages récurrents de l'esclavage. Dans le secteur primaire, l'utilisation dans les mines et les carrières et comme main d'œuvre agricole, notamment dans l'économie de plantation, est commune à une grande partie des sociétés esclavagistes. L'esclavage domestique ainsi que l’esclavage sexuel sont, peut-être plus encore que l'utilisation strictement économique des esclaves, largement représentés tout au long de l'histoire humaine. Enfin, l'utilisation par l'État est fréquente pour l'accomplissement de tâches de travaux publics et de voirie. L'emploi d'esclaves à des fins militaires ou de police publique, plus rare, est une des caractéristiques saillantes de la civilisation musulmane.

 

Les mines et carrières 

Dans l'Antiquité, les esclaves sont indispensables au fonctionnement des carrières qui fournissent les matériaux des grands ensembles architecturaux des grandes cités romaines ou grecques. À Athènes, les esclaves sont les principaux extracteurs des mines d'argent du Laurion, nécessaires à la stabilité monétaire de la cité grecque. Lauffer estime même que près de 30 000 esclaves ont pu travailler dans ses seules mines et leurs moulins de traitement. Sous l'Empire, à Rome, la condamnation aux mines (ad metalla) fait partie des sanctions juridiques les plus redoutées. Au Moyen Âge, les esclaves sont utilisés, à Gênes par exemple, dans l'exploitation des salines. Dans les colonies espagnoles américaines, les esclaves noirs mais surtout indiens sont massivement utilisés dans les mines d'or, d'argent et de cuivre. Les Portugais importeront de leur côté des esclaves noirs pour l'exploitation des riches gisements aurifères brésiliens du Minas Gerais, découverts à la fin du XVIIe siècle.

L'esclavage agricole 

Souvent lié à de grands domaines, l'esclavage agricole s'est massivement développé dans l'Antiquité. À Athènes, il domine dans les exploitations dont les besoins en main d'œuvre dépassent les seules forces d'une famille. À Sparte, les hilotes, dont le statut est proche de celui d'esclave, fournissent l'essentiel de l'approvisionnement de la cité. À la fin de la République, les grandes oliveraies et les grands vignobles de l'Italie centrale utilisent quasi-exclusivement des esclaves, ; l’ergastule est une des modalités de gestion de la population d'esclaves considérée comme la plus dangereuse. C'est de ces régions à forte concentration en esclaves, notamment le Sud de la péninsule et la Sicile, dans des zones pratiquant un élevage extensif, que partiront les grandes révoltes serviles auxquelles sera confrontée la République.

Malgré le développement du servage en Occident à partir du VIIIe siècle, l'esclavage restera présent dans le monde rural, notamment au sein des domaines agricoles des monastères. Dans le monde arabe, l'emploi à grande échelle des esclaves sur les domaines agricoles est quasiment absent, à deux exceptions près : en Mésopotamie au IXe siècle et à Zanzibar au XIXe siècle siècle à la suite de l'explosion de la demande en clou de girofle. En Mésopotamie, les esclaves sont notamment utilisés pour la culture de la canne à sucre, fortement consommatrice de main d'œuvre. Après les croisades, l'Europe reprendra ce mode d'organisation du travail dans les régions où elle tentera d'importer cette culture, notamment dans la péninsule ibérique et dans les îles méditerranéennes. L'exportation de cette économie de plantation par les Portugais dans les îles Atlantiques (îles Canaries, Sao Tomé) puis par les Espagnols sur le continent américain s'inscrit dans la continuité de ce déplacement vers l'ouest ; ce système devient caractéristique de la colonisation américaine qui se tourne presque immédiatement vers l’esclavage pour l'exploitation du sol. La canne à sucre sera ainsi à l'origine de la traite négrière qui se met en place au XVIe siècle siècle. Puis, le développement des cultures du tabac et du coton soutiendra, dans le sud des États-Unis, le niveau de la demande en main-d'œuvre servile.

L'esclavage domestique 

S'il n'a pas une fonction directement économique, l'esclavage domestique permet aux propriétaires de dégager un temps libre (l'otium) indispensable aux activités sociales, politiques et artistiques. Il est très répandu à Rome et à Athènes, où même les citoyens pauvres possèdent souvent un esclave domestique. Ainsi, selon Finley, à Athènes, tout homme, financièrement en mesure d’avoir des esclaves, en possède au moins un. Il s'agit le plus souvent d'un homme à tout faire, qui le suit dans tous ses déplacements et, en fonction de ses ressources, d’une femme, astreinte aux tâches ménagères.

Quasiment absent du monde agricole, l'esclave est au contraire omniprésent dans la sphère domestique arabe. La division sexuelle du travail est, comme dans l'Antiquité gréco-romaine, nettement marquée : là où les hommes servaient de jardiniers, gardiens et homme à tout faire, les femmes occupaient les fonctions de nourrices, femme de chambre, couturières ou cuisinières. La grande majorité des « petits Blancs », les paysans pauvres des Antilles françaises, possédaient eux aussi un esclave destiné aux tâches domestiques. Dans les couches les plus aisées de la société, l'esclavage domestique revêt souvent une fonction ostentatoire. On évalue qu’à l'apogée de l'empire assyrien, une famille aisée de Babylone possède en moyenne de trois à cinq esclaves. Au Xe siècle, un calife de Bagdad, sous la dynastie Abbasside, ne possède pas moins de 10 000 esclaves

 

L'esclavage sexuel 

L'exploitation du corps des femmes pour des fonctions reproductives ou de plaisir constitue un motif récurrent de réduction en esclavage. Les récits mythologiques antiques sont un indice du caractère commun que revêtait cet esclavage sexuel. Le cycle troyen mentionne à plusieurs reprises cette forme d'esclavage ; c'est notamment le sort réservé par les Achéens aux femmes troyennes après la prise de la cité d'Asie Mineure. L'esclavage sexuel est de fait largement répandu dans l'Antiquité, par le biais de la prostitution mais aussi à travers les relations entretenues entre maîtres et esclaves des deux sexes ; les témoignages semblent indiquer que ces dernières n'étaient pas rares à Rome.

Dans le monde arabe, l'exploitation sexuelle constitue pour Gordon Murray « la raison la plus courante d'acquérir des esclaves ». Le statut de concubine est ainsi réservé aux seules esclaves ; en cas d’enfantement, ces dernières étaient protégées de la vente et pouvaient se voir accorder un affranchissement. Dans les maisons les plus aisées, la surveillance des femmes dans les harems est confiée à un ou plusieurs eunuques, qui constituent une autre incarnation du pouvoir accordé au maître sur les fonctions de reproduction de ses esclaves. La dynastie Safavides ou les sultans de Constantinople entretinrent des harems de grande dimension dont le fonctionnement influa de matière notable sur la vie politique. Plus généralement, harems et concubinage constituaient deux éléments fondamentaux de la société patriarcale.

Si aucun statut équivalent à celui de concubine n'existait dans la chrétienté, l'exploitation sexuelle des esclaves des colonies américaines étaient fréquentes comme en atteste le nombre élevé des métissages qui obligea souvent les autorités à se pencher sur le statut des enfants nés de ce type d'union.

Les esclaves publics 

Ils sont la propriété de l'État et assurent les tâches d'intérêt général. Les esclaves sont donc employés comme ouvriers (pour les travaux de voirie), secrétaires ou comptables dans les administration essentielles au bon fonctionnement des différents services publics ou encore la surveillance des égouts et des bâtiments publics. Les premières apparitions de services de pompiers remontent aux temps égyptiens mais Rome a réutilisé ce principe avec des esclaves. Les pompiers romains (Vigiles urbani) étaient très souvent appelés au feu dans les incendies criminels ou accidentels (notamment dans les immeubles Romains, dénommés insula).

Valeur économique 

L'économie classique et la critique de l'esclavage [modifier]

La question de la rentabilité de l’esclavage émerge au XVIIIe siècle avec la pensée économique préclassique et classique. Arguant de la supériorité du travail libre, les physiocrates et Adam Smith ont à cette époque contesté la valeur économique de l'esclavage. On trouve aussi trace de cet argumentaire chez certains penseurs des Lumières et, plus tard, au sein des anti-esclavagistes. Le physiocrate Dupont de Nemours résume l’ensemble des arguments avancés à l’appui de cette thèse quand il déclare que « l'arithmétique politique commence à prouver [...] que des ouvriers libres ne coûteraient pas plus, seraient plus heureux, n'exposeraient point aux mêmes dangers et feraient le double de l’ouvrage ». Suivant ce point de vue, la productivité est induite par l'intérêt du travailleur libre pour son travail, et par l'absence de coût d'achat et de surveillance. Pour reprendre le raisonnement de Smith, le salaire remplace avantageusement les frais d'entretien et d'achat qui incombent aux propriétaires.

Un des arguments les plus couramment avancés pointe ainsi le coût de surveillance et d'entretien des esclaves : les abolitionnistes, tels Victor Schoelcher, font état de l'insécurité qui règne dans les colonies esclavagistes et de la charge financière qui en résulte pour les états métropolitains sous forme d'envoi et d'entretien de troupes nombreuses, ainsi que d'indemnités à verser aux propriétaires dont les biens sont détruits à l'occasion de révoltes d'esclaves.

S'ajoutent aussi des arguments que l'on qualifierait aujourd'hui de macroéconomiques. Pour les physiocrates français, le développement d'un marché intérieur est indissociable du développement du travail salarié. C'est ce qui pousse les plus audacieux d’entre eux à réclamer la suppression des avantages des planteurs coloniaux qui pénalisent les cultivateurs métropolitains de betterave sur le marché du sucre.

Enfin, l'esclavage a été dénoncé comme un frein à l'innovation technique, le dynamisme industrieux des États du Nord des États-Unis étant pointé face à l’apparente stagnation de l'industrie des États du sud.

Pour une grande part, l'affirmation de la supériorité économique du travail libre sur l'esclavage est restée sans fondement empirique. Adam Smith s'appuie pour la justifier sur « l'expérience de tous les temps et de tous les pays », sans toutefois qu'aucune comparaison autre que spéculative ne vienne étayer son raisonnement.

Approches contemporaines de la rentabilité de l'esclavage 

Dans les années 1960, le développement de la cliométrie a relancé aux États-Unis le débat sur la rentabilité de l'esclavage. L'irrationalité du système esclavagiste, à bout de souffle face au développement du capitalisme du nord du pays, était alors communément admise. Outre le faible développement industriel du Sud, l'un des indices de cette crise constituait pour les défenseurs de cette thèse l'augmentation du prix des esclaves, interprétée comme une hausse du prix du travail.

L'approche cliométrique a renouvelé, non sans polémiques, les conclusions traditionnellement retenues à ce sujet. La question de la rentabilité de l'esclavage aux États-Unis ne fait aujourd'hui aucun doute, et seul son taux est encore discuté. Le taux de profit des planteurs serait, pour Meyer de 5 à 8%, avec des pics de 10 à 13% en Caroline du Sud ou en Alabama. Robert Fogel et Stanley Engerman l'estiment pour leur part à « 10% du prix de marché des esclaves », soit un niveau comparable à celui des investissements des industriels du nord des États-Unis. Les études américaines insistent notamment sur le fait que l'esclave est non seulement une force de travail mais aussi un investissement : pour Conrad et Meyer, l'augmentation du prix des esclaves était au contraire un indice de la croissance du marché. Fogel a par ailleurs souligné que le Sud avait développé une industrie « domaniale », dynamique bien que dépendante des productions agricoles, à travers la transformation des matières premières (sucreries, égreneuses de coton, trieuses de riz, scierie...).

S'agissant des plantations françaises des Antilles à l’apogée du prix du sucre, Paul Butel estime que le taux de profit des planteurs oscille entre 15 et 20%

 

La sortie de l'esclavage 

La révolte 

À Rome, les esclaves se sont révoltés plusieurs fois, notamment ceux qui ont suivi Spartacus, un ancien gladiateur qui fut tué avec ses compagnons lors de la troisième Guerre servile (entre 73 et 71 av. J.-C.). Seul les esclaves malades, ou infirmes furent libérés ou abandonnés par leur maîtres,

 

L'affranchissement 

 

l’affranchissement peut se dérouler de 4 façons différentes :

- La première est par testament du maître (= testamento), c’est le cas le plus fréquent ; - La seconde est le cens, dénombrement de la population tous les 5 ans. Le maître inscrit l’esclave sur la liste, ce qui en fait un affranchi; - La troisième est par décision judiciaire : le maître ou un magistrat touche l’esclave de sa baguette (= vindicta) est prononce les mots suivants : « je dis que cet homme est libre. » - Enfin, la dernière possibilité est le rachat de sa liberté avec un pécule (= peculium, i n.)

Malgré cet affranchisemment, l'esclave n'a pas tout les droits d'un citoyen romain, seul son fils en bénéficiera.

Les abolitions 
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Médaillon abolitionniste britannique (1795)

En France, le 16 pluviôse an II (4 février 1794), la Convention vote l'abolition de l'esclavage dans les colonies françaises (ou ce qu'il en reste). Cette mesure sera abrogée par Napoléon Bonaparte le 20 mai 1802 sous l'influence, notamment, du traité d'Amiens. De retour de l'île d’Elbe en 1815, Napoléon décrète l'abolition de la traite des esclaves, qui aligne la France sur la décision que vient de prendre le congrès de Vienne. Sa résolution est confirmée par le traité de Paris le 20 novembre 1815. L'esclavage est aboli en 1833 en Angleterre et 1847 dans l'Empire ottoman ainsi que dans la colonie suédoise de Saint-Barthélemy. La France, elle attendra 1848, année qui voit Victor Schoelcher faire adopter, définitivement, le décret d'abolition pour ce qui concerne l'hexagone.

En 1865, les États-Unis promulguent le 13e amendement interdisant l'esclavage. La question de l'esclavage conduisit Abraham Lincoln à promettre son abolition s'il était élu. Son élection conduisit donc les États du Sud à demander la sécession. Celle-ci leur fut refusée (elle aurait en effet privé les caisses fédérales de l'essentiel de ses impôts), conduisant à la guerre civile. La guerre de Sécession qui en suivit sera la plus meurtrière de toute l'histoire de ce pays.

Bien que l’affranchissement d’esclaves soit une œuvre charitable selon l’islam, les pays musulmans hésitent encore plus que les Européens à abolir l’esclavage : les derniers pays du monde à ratifier l’abolition de l’esclavage sont l’Arabie saoudite en 1962 et la Mauritanie en 1981.

En droit positif, la prohibition de l'esclavage est contenue dans les articles 4 de la Convention européenne des droits de l'homme et de la Déclaration universelle des droits de l'homme, l'article 8 du Pacte des droits c

ivils et politiques de l'ONU, dans la convention de Genève de 1926, de New York de 1956, de l'OIT de 1930 et 1936.

Persistances 

Article détaillé : Esclavage moderne.

L'esclavage n'a cependant pas disparu avec les abolitions des traites et des esclavages dans le monde occidental. En 1931, le journaliste George Schuyler (en) publiait Slaves Today : A Story of Liberia. Aujourd'hui encore l'esclavage persiste dans certaines régions du monde, comme la péninsule arabique, le sous-continent indien, le Niger, le Mali ou la Mauritanie. L'Organisation internationale du travail (OIT) estime à 25 millions le nombre de personnes vivant actuellement dans des conditions assimilables à de l'esclavage, d'où le terme d’« esclavage moderne ». Selon l'ONU, chaque année, deux millions de personnes sont réduites en esclavage.

L'esclavage réapparaît actuellement au Soudan. Les musulmans du Nord ont rétabli la charia lors de la décolonisation et l'appliquent de force aux Noirs chrétiens et animistes du Sud qui se sont rebellés. Ceux-ci, repoussés dans la Province Équatoriale, la plus insalubre, ont résisté de leur mieux depuis l'indépendance. Aussi les forces gouvernementales ont-elles massacré les populations civiles de nombreux villages et continuent à y enlever de nombreux enfants pour les convertir à l'islam et les utiliser comme esclaves à Khartoum.

En Mauritanie, en dépit de son interdiction officielle en 1981, l'esclavage est une pratique qui persiste. Le 8 août 2007, le Parlement du pays a adopté une loi criminalisant l'esclavage, puni de dix ans d'emprisonnement.

Par glissement sémantique, certaines situations sont assimilées à de l'esclavage moderne :

En 2000, l'UNICEF estimait que 200 000 enfants étaient retenus en esclavage en Afrique centrale et occidentale. D'après l'Organisation internationale des migrations (OIM) quelque 200 000 femmes et enfants sont victimes de l'esclavage.

La pratique des enfants soldats peut également être assimilée à une forme d'esclavage, d'autant qu'à l'emprise psychologique mise en œuvre sur des enfants, s'ajoute la dépendance physiologique obtenue par l'usage de drogues fortes.

Mémoires de l'esclavage 

Des jours de commémoration de l'abolition existent dans toutes les îles des Antilles sauf dans l'île de Saint-Barthélemy. 2006 marque l'année de la reconnaissance de la responsabilité historique de l'État français à propos de l'esclavage, dont les victimes seront dorénavant commémorées tous les 10 mai. Ce jour est également l'anniversaire de l'adoption de la loi Taubira, grand pas dans la démarche mémorielle touchant à l'esclavage, qu'elle qualifie en particulier de « crime contre l'humanité ».

La place réservée dans la mémoire collective à certaines personnalités est également notable, notamment les « nègres marrons » et certaines figures comme la mulâtresse Solitude, qui a donné lieu à un roman.

 

 

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Publié dans Exemples de vie

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C
<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Il faut quand même reconnaître que c'était vraiment une honte.<br /> <br /> <br /> Bises mon cher Franck<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
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N
<br /> <br /> Mon cher Artaban,<br /> <br /> <br /> Merçi pour la mémoire des esclaves disparus ...<br /> <br /> <br /> Aujourd'hui, l'être humain est esclave de ses péchés ...<br /> <br /> <br /> Amicalement ...<br /> <br /> <br /> <br />
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