La Poya

Publié le par Franck

Poya

La poya (qui signifie en arpitan « montée »,

«  côte », en français puy, du latin PODIUM),

ou montée en alpage est le nom,

de la transhumance dans les Alpes suisses.

Ce terme est aussi utilisé en France,

en particulier dans la vallée de Chamonix, dans les Alpes.

En Suisse, dans le village d'Estavannens (en Gruyère),

la Poya est une tradition séculaire qui dure encore,

où art et fête populaire se joignent à l'agriculture.

Cette région est spécialisée dans l'élevage

et la fabrication de fromage.

Le fromage de Gruyère est connu depuis le XVIe siècle.

C'est un fromage au lait de vache entier, au lait cru.

 

Un chalet à fronton décoré de poyas à Estavannens

 

 

La montée à l'alpage et la désalpe 

Les troupeaux de vaches passent les mois d'été à l'alpage.

Les déplacements que sont la montée en alpage au printemps,

comme la désalpe (ou Rindyà) en automne,

sont devenus des défilés où l'armailli,

est fier de parader avec ses bêtes,

qui sont décorées pour l'occasion.

(Ne pas confondre donc la montée à l'alpage qui est la poya,

et la descente de l'alpage,

- autrement dit la désalpe - qui est la rindyà)

Pour la poya et la rindyà, l'armailli porte le bredzon du dimanche,

le capet, le beau loyi (poche à sel) neuf et la canne à la main.

Les vaches sont bichonnées et fleuries.

Une partie du troupeau porte les grosses sonnailles,

avec de belles courroies brodées et les initiales du propriétaire.

Le « train du chalet » transporte le matériel jusqu’à l’endroit,

où l’on peut arriver avec un char tiré par un mulet :

les malles des armaillis et tous les outils du chalet,

c'est-à-dire le baquet à lait, les petits baquets à crème,

le grand fouet, le tranche-cailler, la passoire,

avec son support, les baquets à traire, la baratte,

l'oji (châssis servant à transporter les fromages,

sur la tête et les épaules).

Au XVIIIe siècle, il y avait près d'une centaine d'alpages en activité.

À cette époque, la production annuelle,

est de 14 000 meules de fromages.

Dans ce contexte, la Poya est connue bien au-delà des campagnes.

La Gruyère a fourni des troupeaux aux familles princières de France.

Celles-ci se sont alors intéressées aux parades de la Poya.

Les armaillis défilent également,

à la Fête des vignerons de Vevey dès 1819.

 

Fête populaire

À Estavannens a lieu en mai 1956,

la première fête populaire de la Poya d'Estavannens,

organisée par l'association gruérienne,

pour le costume et les coutumes.

Elle célèbre le 75e anniversaire de la publication,

le 21 mai 1881, d'un poème publié par Étienne Fragnière,

racontant la montée à l'alpage.

Depuis, la fête s'est renouvelée,

en 1960, 1966, 1976, 1989 et 2000.

 

 


Estavannens (en Gruyère, Suisse) - la chapelle du Dah

 

Estavannens (en Gruyère, Suisse) -
la chapelle du Dah

Estavannens (en Gruyère, Suisse) - vue aérienne

Estavannens (en Gruyère, Suisse) -
vue aérienne

 

 


 

Estavannens (en Gruyère, Suisse) - la cascade du Dah

 

Estavannens (en Gruyère, Suisse) -
la cascade du Dah

 


Désalpe à Bulle [http://www.flickr.com/photos/vlatinescu/sets/]

 

 

 

Désalpe à Bulle

Depuis le chalet de Vacheresse, Estavannens [http://www.flickr.com/photos/vlatinescu/sets/]

 

Depuis le chalet de Vacheresse, Estavannens

 

Transhumance en France 

Provence 

La question des origines de la transhumance en Provence,

mobilise les historiens et les archéologues.

Les grands déplacements de troupeaux de la plaine à la montagne,

avaient probablement disparu durant le haut Moyen Âge,

faute des conditions politiques,

(organisation territoriale et sécurité des chemins),

et économiques (marchés pour écouler les produits des troupeaux),

nécessaires à de telles entreprises.

Mais la découverte dans les années 1990 dans la plaine de la Crau,

de fondations de nombreuses bergeries datant de l'époque romaine,

et de l'âge du Fer laisse à penser que déjà,

dans l'Antiquité des troupeaux d'ovins transhumaient,

corroborant Pline l'Ancien affirmant que,

dans "les Plaines-de-pierre" de la province Narbonnaise,

les moutons "par milliers convergent,

depuis des régions lointaines pour brouter".

Le balancement des troupeaux se remet en place,

dès avant le XIIe siècle à l'initiative des communautés montagnardes,

qui ne peuvent nourrir en bergerie,

des troupeaux importants durant les longs hivers,

et vont chercher l'herbe des plaines.

Les grands monastères (Abbaye Saint-Victor de Marseille, Boscodon…),

les imitent dès le XIIIe siècle en mettant en valeur leurs possessions,

dans le haut comme dans le bas pays,

imités, à partir du XIVe siècle par les grandes familles nobles.

Il s'agit alors d'une transhumance de la plaine à la montagne,

avec des troupeaux de mille bêtes et plus.

Les archives du Comté de Nice font état de contrats,

passé au début du XIVe siècle,

entre des montagnards et des éleveurs de basse Provence.

Les premiers ayant rapporté au pays les troupeaux des seconds.

C’est à partir de 1325 que l’on voit des éleveurs,

envoyer en commun de gros troupeaux (de près de 2000 têtes),

vers les pâturages de haute montagne.

Dans un premier temps, cette transhumance sera perçue,

par beaucoup comme de la concurrence pour les élevages de montagne,

(Musset, 1986). Dans Sociétés paysannes,

Henri Mendras citait ce conflit de pouvoir,

comme illustration d'un processus d'installation d'un équilibre,

entre ressources naturelles et exigences sociales (Mendras, 1976).

De nombreux actes notariaux parus après 1380,

témoignent de ce mode de transhumance.

Au XVe siècle, la grande transhumance,

réservée au siècle précédent aux troupeaux,

des grandes familles et des éleveurs riches,

se démocratise. L’estivage des moutons devient massif.

À partir de 1450 chaque année entre 40 000 et 50 000 moutons

quittent Aix-en-Provence et ses alentours pour les alpages (Leydet, 1982).

À partir de là, la grande transhumance,

ne cessera de s’étendre vers le nord.

La grande transhumance ne peut plus alors,

être résumée à un acte de circulation,

elle devient un véritable circuit commercial.

Nous assistons à une sorte de « marchandisation » des estives.

Le plus souvent, les éleveurs provençaux traitent,

avec des intermédiaires qui jouent,

un rôle très important dans le « marché de l’estive ».

Ce sont eux qui acheminent les troupeaux vers les alpages.

Ce sont eux également qui assurent la police des transhumances

Ils se mettent à la tête du rassemblement,

de plusieurs dizaines de milliers de moutons,

qu’ils prennent en charge jusqu’aux alpages.

On assiste ainsi, à l’émergence,

de professionnels de la transhumance,

qui à certaines périodes jouiront d’un,

quasi-monopole de l’activité (Coulet, 1986).

 

Pastourelle

Les transhumances nécessitaient,

et nécessitent encore beaucoup de main-d'œuvre,

selon la taille des troupeaux

 

Transhumance dans les Alpes du Sud (Vallée du Buëch, 2009)
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Publié dans Exemples de vie

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